Qui aurait parié qu’au cœur d’une insécurité rampante, le département de l’Ouest, épicentre des violences urbaines, et celui de l’Artibonite, régulièrement secoué par des tensions armées, s’imposeraient comme des champions académiques ? Et pourtant, les chiffres sont là : 95,16 % de réussite dans l’Ouest, 86,01 % dans l’Artibonite. Dans un pays où le bruit des balles couvre parfois la voix des enseignants, ces résultats ont valeur de symbole.
Il faut imaginer ces adolescents, cartable sur l’épaule, traversant des quartiers marqués par la peur pour rejoindre leur salle d’examen. Il faut penser à ces enseignants qui, malgré les menaces et les routes coupées, tiennent coûte que coûte leur tableau noir. Cette réussite, ce n’est pas seulement une victoire scolaire, c’est un acte de résistance silencieuse. Elle dit haut et fort que, même dans les zones les plus fragilisées, l’école demeure un refuge, un espace où l’on continue de croire en demain.
Mais cette performance interroge aussi. Faut-il y voir un sursaut d’espoir ou le reflet d’un système d’évaluation à double vitesse ? Les disparités entre départements, avec un Nord-Ouest à peine au-dessus de 54 % de réussite, rappellent qu’Haïti n’avance pas au même pas partout. Si l’Ouest et l’Artibonite prouvent que l’excellence peut éclore dans l’adversité, d’autres territoires crient leur besoin de moyens, de stabilité et de vision.
En vérité, cette réussite record dans la tourmente est un signal double : elle célèbre le courage de toute une génération, mais elle met aussi au défi nos dirigeants de transformer cet exploit en norme, et non en exception. Car un pays qui réussit à faire fleurir l’éducation dans les zones les plus menacées a déjà prouvé qu’il peut tout… à condition de le vouloir vraiment.
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